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Chapitre 29
L’ambition de M. House
Tandis que dans cette entreprise toujours secrète, M. Balfour et
ses associés s’avançaient vers le pouvoir en Angleterre pendant la
Première Guerre mondiale, un groupe semblable d’hommes prenait
secrètement forme dans la République américaine. La machine
politique qu’ils construisirent produisit son plein effet presque
cinquante ans plus tard, quand le président Truman fondit réellement
l’État sioniste en Palestine.
En 1900, les Américains s’accrochaient toujours à leur « rêve
américain », et l’essence de cela était d’éviter les « enchevêtrements
avec l’étranger. » En fait, l’attaque contre l’Espagne à Cuba en 1898 les
avait déjà séparés de cet ancrage sécurisé, et les origines mystérieuses
de cette petite guerre sont donc d’un intérêt continu. On provoqua le
public américain pour qu’il explose en une frénésie guerrière, de la
façon familière, quand on raconta que le Maine avait explosé dans le
port de la Havane à cause d’une mine espagnole. Quand il fut renfloué,
de nombreuses années plus tard, on découvrit que ses plaques avaient
été soufflées vers l’extérieur par une explosion intérieure (mais à ce
moment-là, « la foule» avait depuis longtemps perdu son intérêt pour la
question).
L’effet de la guerre hispano-américaine (« l’enchevêtrement»
ininterrompu des américains dans les affaires des autres) prêta une
importance majeure à la question : qui devait exercer le pouvoir
exécutif en Amérique, car la nature de n’importe quel
« enchevêtrement » en dépendait clairement. La réponse à cette
question, de nouveau, fut gouvernée par l’effet d’une guerre
précédente, la Guerre de Sécession américaine de 1861-1865. Ses
conséquences principales (peu comprises par les Nordistes et les
Sudistes en lutte) furent de changer sensiblement la nature, d’abord
de la population, ensuite du gouvernement de la République.
Avant la Guerre de Sécession, la population américaine était
principalement irlandaise, irlando-écossaise, écossaise, britannique,
allemande et scandinave, et à partir de cet amalgame, un individu
distinctement « américain » se développa. Dans la suite directe de cette
guerre, l’ère de l’immigration sans restriction commença, qui en
quelques décennies amena en Amérique des millions et des millions de
nouveaux citoyens d’Europe de l’Est et du Sud. Ceux-ci comprenaient
une grande masse de juifs des régions talmudiques de Russie et de la
Pologne russe. En Russie le rabbinat s’était tenu entre eux et
« l’assimilation », et cela continua quand ils atteignirent l’Amérique.
290
Ainsi, le XXe siècle, à son début, lança-t-il la question : quel rôle leurs
leaders acquérraient-ils dans le contrôle politique de la République et
de ses entreprises étrangères ? Les événements postérieurs montrèrent
que la conspiration de l’Est, sous ses deux formes, entra en Amérique
par cette immigration massive. Le processus d’acquisition d’une
mesure sans cesse croissante de pouvoir politique démarra dans les
coulisses, vers 1900, et devait devenir le sujet principal de la vie
nationale américaine durant les cinquante années suivantes.
L’homme qui le premier impliqua l’Amérique dans ce processus fut
un certain M. Edouard Mandell House (populairement connu comme le
colonel House, mais il n’avait fait aucun service militaire), un
gentleman du Sud, principalement de descendance hollandaise et
anglaise, qui grandit au Texas durant la période amère de la
Reconstruction, qui suivit la Guerre de Sécession. Il constitue un
personnage remarquable dans cette histoire. Comme d’autres
connaisseurs exulteraient au goût d’un cognac rare, il adorait
l’exercice secret du pouvoir par le biais des autres, et le confia avec
franchise à son journal. Il fuyait la publicité (dit son éditeur, M.
Charles Seymour) « par un sens de l’humour sardonique qui était
chatouillé par la pensée qu’invisible et souvent insoupçonné, sans
grande richesse ni poste élevé, par le simple pouvoir de la personnalité et du bon sens, il détournait en réalité les courants de l’Histoire. » Peu
d’hommes ont exercé un si grand pouvoir en si totale
irresponsabilité: « Il est assez facile pour quelqu’un sans responsabilité de s’asseoir autour d’un cigare et d’un verre de vin, et de décider de ce
qu’il y a de mieux à faire », écrivit M. House.
Le choix des mots de son éditeur est exact ; M. House ne guida pas la politique nationale américaine, mais la détourna vers le
sionisme, le soutien de la révolution mondiale et la promotion de
l’ambition du gouvernement mondial. Le fait qu’il exerca le pouvoir
secrètement est prouvé. Ses motivations pour l’avoir exercé dans cette
direction-là sont difficiles à découvrir, car ses pensées (telles que
révélées par son journal et son roman) semblaient être si confuses et
contradictoires qu’aucune image claire n’émerge d’elles.
L’immense rapport quotidien de son règne secret (les Papiers
Intimes) exposa entièrement comment il travaillait. Il laisse sans
réponse la question de ce qu’il voulait, en fin de compte, ou s’il savait
même ce qu’il voulait ; quant à cela, son roman montre seulement un
esprit rempli de notions démagogiques insensées, jamais clairement
étudiées dans le détail. L’apostrophe ampoulée sur la page de garde est
typique : « Ce livre est dédié aux nombreux malheureux qui ont vécu et
sont morts en ayant manqué les opportunités, parce que dès le départ,
la structure sociale mondiale était injuste » ; cela signifie apparemment
que M. House, qui se prenait pour un homme religieux, avait une
291
piètre opinion du travail d’une autorité précédente, décrite en ces
mots : « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre ».
Dans la recherche des origines des idées politiques de M. House
(qui furent d’abord apparentées au communisme ; plus tard dans sa
vie, quand les dégâts étaient faits, il devint plus modéré), le chercheur
est lancé sur des pistes significatives. Son éditeur trouve dans sa
première pensée une note « réminiscente de Louis Blanc et des
révolutionnaires de 1848». Gardant cela en mémoire, j’ai dirigé
antérieurement l’attention des lecteurs vers Louis Blanc, le
révolutionnaire français qui, pendant un moment, en 1848, sembla
susceptible de jouer le rôle de Lénine, et convoqua l’Assemblée des
délégués des travailleurs, qui était une anticipation des Soviétiques de
1917.
De telles notions, chez un Texan de la fin du XIXe siècle, sont
aussi inattendues que le bouddhisme chez un Esquimau. Néanmoins,
M. House acquit ces idées dans sa jeunesse ; quelqu’un les avait
implantées en lui. Son deuxième prénom, Mandell, était celui « d’un
marchand juif de Houston, qui était l’un des amis les plus intimes de
son père ; le fait que le père ait donné un nom juif à son fils indique
l’attitude de la famille envers cette race. » (M. Arthur D. Howden, son
biographe) Dans le roman de M. House, le héros refuse tout
avancement pour aller vivre dans une chambre modeste de l’East Side
avec un juif polonais, arrivé en Amérique après des émeutes
antisémites à Varsovie, causées par le meurtre du fils d’un haut
représentant gouvernemental, commis par « un jeune juif, harcelé audelà
de l’endurance. » Plus tard, le beau-frère et conseiller de M. House
fut un juif, le Dr Sidney Mezes, qui fut l’un des initiateurs du plan du
gouvernement mondial de ce siècle dans sa toute première forme (The
League to Enforce Peace (La Ligue d’Imposition de la Paix - NdT)).
C’est tout ce qui peut être mis à jour sur l’atmosphère
intellectuelle de la période formatrice de l’esprit de M. House. Dans un
de ses passages les plus révélateurs, M. House lui-même commente la
suggestion d’idées faite à d’autres, et montre, apparemment sans le
comprendre, à quel point il était impuissant en fin de compte, lui qui
pensait être tout-puissant : « Avec le président, comme avec tous les
autres hommes que j’ai cherché à influencer, c’était invariablement
mon intention de lui faire penser que les idées qu’il tirait de moi
étaient les siennes propres… Normalement, pour dire la vérité, l’idée
ne m’était pas originale… La chose la plus difficile au monde est de
suivre à la trace n’importe quelle idée jusqu’à sa source… Nous pensons
souvent qu’une idée nous est originale quand, à la simple vérité, elle a été inconsciemment absorbée de quelqu’un d’autre. »
292
Il commença à apprendre la politique au Texas, quand il n’avait
que dix-huit ans, percevant alors, pendant une élection présidentielle
(1876), que :
« …deux ou trois hommes au Sénat et deux ou trois à la Chambre, et
le président lui-même, dirigeaient le gouvernement. Les autres
n’étaient que des hommes de paille…
Par conséquent, je n’avais aucune ambition d’avoir une fonction, ni
n’avais aucune ambition de parler. » (Il met la même idée dans la
bouche d’un politicien, dans son roman de 1912)
« À Washington… j’ai constaté que le gouvernement était dirigé par
quelques hommes ; qu’à l’extérieur de ce petit cercle, personne
n’avait beaucoup d’importance. C’était mon ambition d’y faire
irruption si cela était possible, et mon ambition a maintenant fait un
bond, au point de vouloir, non seulement en faire partie, mais plus
tard, être CELA…
Le président m’a demandé d’entreprendre la direction de sa
campagne… Il a été nommé et réélu à une écrasante majorité… et
j’étais maintenant bien à l’intérieur du cercle enchanté, et à portée de
mon désir suivant de n’avoir aucun rival… J’enroulai un fil presque
invisible autour du peuple, qui le maintenait fermement… )
Dans cet esprit, M. House entra en politique au Texas : « Je commençai en haut plutôt qu’en bas… cela est mon habitude de
mettre quelqu’un d’autre à la tête théoriquement, de sorte que je puisse
faire le véritable travail sans être dérangé par les demandes qui sont
faites à un président… Chaque responsable des campagnes que je
dirigeai recevait publicité et applaudissements tant de la presse que
du peuple, pendant la campagne… ils quittaient l’attention du public
en quelques mois… et pourtant, quand la campagne suivante
arrivait, le public et la presse acceptaient avec autant d’impatience
un autre homme de paille. »
M. House utilisa le Texas plus ou moins comme un jeune acteur
prometteur pourrait utiliser la province. Il réussit si bien comme
organisateur de parti qu’au changement de siècle, il était le vrai
dirigeant de l’État, et était assis quotidiennement dans le bureau de
son gouverneur (nommé par M. House et oublié depuis longtemps) au
Capitole, où il choisissait des sénateurs d’État et des membres du
Congrès, et traitait les requêtes des nombreux officiels qui assiègent
habituellement un gouverneur d’État. La tournée provinciale
accomplie, il se prépara à conquérir la capitale. En 1900, il était « lassé
du poste que j’occupais au Texas » et était « prêt à participer aux
293
affaires nationales. » Après une préparation supplémentaire, il
commença en 1910, alors que la Première Guerre mondiale
approchait, « à rechercher un candidat approprié à la nomination
démocrate pour l’élection présidentielle. »
Ainsi M. House, âgé de cinquante ans, était-il un faiseur de
présidents. Avant de lire ses Papiers Intimes, j’étais très impressionné
par « la connaissance étrange » affichée par un sioniste américain
majeur, le rabbin Stephen Wise, qui en 1910, dit devant un auditoire
du New Jersey : « Mardi, M. Woodrow Wilson sera élu gouverneur de
votre État ; il n’achèvera pas son mandat comme gouverneur ; en
novembre 1912, il sera élu président des États-Unis ; il sera investi
président pour la deuxième fois. » C’était de la préconnaissance, à la
manière de celle révélée par les Protocoles, Léon Pinsker et Max
Nordau, mais une recherche approfondie révéla que le rabbin Wise la
tenait du colonel House !
Apparemment, M. Wilson avait été étudié de près par le groupe
d’hommes secrets qui était en passe de fusionner, car ni M. House, ni
le rabbin Wise à ce moment-là ne l’avaient rencontré ! Mais M. House
« devint convaincu qu’il avait trouvé son homme, bien qu’il ne l’eût
jamais rencontré… “Je me suis tourné vers Woodrow Wilson… comme
étant le seul homme… qui en tous points se montrait à la hauteur de
la tâche” » (M. Howden). La mesure standard utilisée est indiquée dans
un passage postérieur: « L’ennui avec l’obtention d’un candidat à la
présidence, c’est que l’homme qui est le mieux adapté pour cette place
ne peut être désigné, et, s’il était désigné, il ne pourrait être élu. Le
Peuple prend rarement le meilleur homme adapté au poste ; il est donc
nécessaire de travailler pour le meilleur homme qui puisse être désigné
et élu, et en ce moment, Wilson semble être cet homme. » (Cette
description, de nouveau, est qualifiée par l’allusion, dans le roman de
M. House, aux méthodes utilisées par un groupe puissant pour élire « sa créature » à la présidence).
L’idée sioniste s’associa à l’idée révolutionnaire - parmi le groupe
d’hommes qui était en train de secrètement choisir M. Woodrow Wilson
pour la présidence - en la personne de ce rabbin Stephen Wise (né à
Budapest, comme Herzl et Nordau). Il était l’organisateur sioniste en
chef en Amérique, et en tant que tel, représentait encore une sorte de
curiosité parmi les juifs d’Amérique, qui à cette époque rejetaient le
sionisme et se méfiaient « des juifs de l’Est. »
Jusqu’en 1900, comme le dit le rabbin Wise, le sionisme en
Amérique se limitait aux juifs immigrants de Russie, qui l’avaient
amené avec eux des ghettos talmudiques de là-bas ; la masse des juifs
américains était d’origine allemande, et rejetaient catégoriquement le
sionisme.
294
Entre 1900 et 1910, un million de nouveaux immigrants juifs
arrivèrent de Russie, et, sous organisation sioniste, commencèrent à
former un corps important d’électeurs ; là était le lien entre M. House
(dont la stratégie électorale sera décrite) et le rabbin Wise. Le rabbin
Wise, qui était principalement connu comme orateur militant, pour ne
pas dire agitateur, concernant les questions relatives au travail, n’était
alors pas un personnage juif représentatif, et néanmoins (comme le Dr
Weizmann en Angleterre), il était l’homme à qui les potentats politiques
donnaient secrètement les entrées et prêtaient l’oreille.
La force de ce groupe secret est montrée par le fait qu’en 1910,
quand M. House eut confidentiellement décidé que M. Wilson devait
être le prochain président, le rabbin Wise proclama publiquement qu’il
le serait, et pour deux mandats. Cela nécessitait un remaniement la
politique du rabbin, car il soutenait toujours le Parti républicain ;
après la sélection secrète de M. Wilson par M. House, le rabbin Wise
passa au Parti démocrate. Ainsi, les idées « révolutionnaires » confuses
de M. House et celles parfaitement claires du sionisme arrivèrent-elle
ensemble sur le seuil de la Maison Blanche. L’entente au sein du
groupe était cordial : M. Wise déclare (après l’élection) que « nous
avons reçu une aide chaleureuse et encourageante de la part du
colonel House, ami intime du président… House a non seulement fait
de notre cause l’objet de son attention particulière, mais a servi d’officier
de liaison entre l’administration de Wilson et le mouvement sioniste. » Le
parallèle étroit entre le cours de ces procédés secrets en Amérique et
ceux en Angleterre est montré ici.
Le secret de la mainmise de M. House sur le Parti démocrate
repose sur la stratégie qu’il avait inventée pour gagner les élections. Le
Parti démocrate n’avait pas été au pouvoir depuis presque cinquante
ans sans interruption, et House avait inventé une méthode qui faisait
de la victoire une quasi-certitude mathématique. Le Parti démocrate
devait, en fait, devoir ses victoires en 1912 et 1916, aussi bien que les
victoires du président Roosevelt et du président Truman en 1932,
1936, 1940, 1944 et 1948, à l’application du plan de M. House. Dans
ce plan électoral, qui dans son domaine mérite peut-être le nom de
génie, se trouve l’effet persistant de M. House sur la vie de l’Amérique ;
ses idées politiques n’étaient jamais formées de façon claire, et il les
changeait fréquemment, si bien qu’il forgea un instrument par lequel
les idées des autres furent mises en application ; l’instrument lui-même
fut brillamment conçu.
En essence, c’était un plan pour obtenir le votes massif des
« natifs de l’étranger » - les nouveaux immigrés – an faveur du Parti
démocrate, en faisant appel à leurs sentiments raciaux et leur réflexes
émotionnels particuliers. Il fut mis au point de façon très détaillée, et
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réalisé d’une main de maître, dans cette branche particulière que sont
les sciences politiques.
Ce qui est unique et prodigieux dans ce plan, c’est que M. House
le publia anonymement, la même année 1912, où M. Wilson,
secrètement « choisi », fut officiellement désigné et élu. Au cours de
cette année chargée, M. House trouva le temps d’écrire en trente jours
un roman intitulé Philip Dru : Administrator (ce terme inhabituel
rappelle l’allusion des Protocoles aux « administrateurs [que] nous
choisirons… »). Le chapitre intitulé « La fabrication d’un président »,
qui n’est manifestement pas une fiction, transforme ce roman presque
illisible en un document historique de première importance.
Dans ce chapitre de son roman (que M. House fut poussé à
publier par son mentor assidu, le Dr Sidney Mezes), un sénateur
américain du nom de Selwyn est décrit comme se préparant à « diriger
la Nation d’une main absolue, et pourtant, on ne saurait pas que c’est
lui, le pouvoir dirigeant. » Selwyn est M. House. Apparemment, il ne
put résister à la tentation de donner un indice de son identité, et fit en
sorte que « Selwyn » invite l’homme qu’il avait choisi comme présidentmarionnette
(« Selwyn recherche un Candidat ») à « dîner chez moi,
dans mes salons à Mandell House. »
Auparavant, Selwyn invente « un plan infâme », de concert avec un
certain John Thor - « le grand prêtre de la finance » - plan par lequel
« une organisation complète et compacte », utilisant « une tromperie des
plus ignobles eu égard à ses opinions et intentions réelles « , pourrait
« élire sa créature à la présidence ». Le financement de cette ligue
secrète était « simple. » « L’influence de Thor dans toute l’Amérique
commerciale était absolue… Thor et Selwyn choisirent les mille »
(millionnaires) « qui devaient donner chacun dix mille dollars… Thor
devait dire à chacun d’eux qu’il y avait une question, touchant au bien
commun de la fraternité des affaires, qui nécessitait vingt mille dollars,
et que lui, Thor, en fournirait dix, et voulait que chacun en fournisse
autant… Il n’y avait que quelques hommes d’affaire… qui ne
s’estimaient pas heureux de se voir convoqués à New York par Thor, et
qu’on leur demande de le rejoindre aveuglément dans un financement
dont le but était la sauvegarde des richesses». L’argent de ce « grand
fonds de corruption » est placé par Thor dans différentes banques,
versé sur demande, par Selwyn, sur les comptes d’autres banques, et
depuis ces dernières, transféré à la banque personnelle du gendre de
Selwyn ; « le résultat fut que le public n’aurait aucune chance d’être au
courant du fonds, ni de la manière dont il était dépensé. »
Sur cette base de financement, Selwyn choisit sa « créature », un
certain Rockland, (M. Wilson), qui, en dînant avec Selwyn à « Mandell House », s’entend dire que sa responsabilité en tant que
président sera « diffuse » : « bien qu’un président posède le droit
296
constitutionnel d’agir seul, il n’a aucun droit moral d’agir en
contradiction des principes et traditions de son parti, ou des conseils
des leaders du parti, car le pays accepte le candidat, le parti et les
conseillers du parti comme un tout, et non séparément » (ce passage
ressemble fortement aux allusions des Protocoles à « la responsabilité
des présidents » et à l’autorité suprême de leurs « conseillers. »)
Rockland acquiesce humblement à cela. (Après l’élection, « ennivré
par le pouvoir et l’adulation des flagorneurs, à une ou deux reprises,
Rockland s’affirme et agit sur des questions importantes sans s’être
d’abord entretenu avec Selwyn. Mais, après avoir été violemment
attaqué dans les journaux de Selwyn… il ne fit aucune nouvelle
tentative d’indépendance. Il se sentait tout à fait impuissant entre les
mains de cet homme fort, et en effet, il l’était. » Ce passage du roman de M. House de 1912, écrit avant
l’investiture de M. Wilson, pourrait être comparé à un passage des
Papiers Intimes de M. House, de 1926, rapportant sa véritable relation
avec le candidat pendant la campagne électorale. Ce passage affirme
que M. House rédigea les discours du candidat à la présidentielle, et le
chargea de ne tenir compte d’aucun autre conseil, sur quoi M. Wilson
admit des imprudences, et promit « de ne pas agir en indépendant à
l’avenir. » Dans le roman, on voit Selwyn en train de raconter à Thor la
tentative de Rockland d’échapper à la sujéton : « Quand il raconta les
efforts de Rockland pour se libérer, et la manière dont il l’avait ramené,
se tordant sous son échec, ils rirent joyeusement » ; ce chapitre est
intitulé « Les conspirateurs jubilants »).
Un autre chapitre montre comment l’élection de la « créature » fut
accomplie. Le plan qui est décrit transforme pratiquement la
campagne électorale en une science exacte, et gouverne toujours la
campagne électorale en Amérique. Il est basé sur le calcul fondamental
de M. House selon lequel environ 80 pour cent des électeurs
voteraient, quelles que soient les circonstance, pour un des deux
partis rivaux dans des proportions à peu près égales, et cette dépense
d’argent et d’effort doit donc se concentrer sur les « 20 pour cent
fluctuants. » Puis, il analyse ces 20 pour cent en détail, jusqu’à ce que
le petit résidu soit isolé, sur lequel l’effort extrême doit être appliqué.
Chaque once ou centime de dépenses inutiles est éliminé, et une
masse d’énergie est libérée, qui doit être dirigée contre le petit corps
d’électeurs qui peut faire pencher le résultat. Ce plan a tant fait pour
« détourner » le cours des événements en Amérique et dans le monde
qu’il faut ici le résumer en détail.
Selwyn commence la campagne d’investiture en éliminant tous les
États dans lesquels l’un ou l’autre parti est sûr de gagner. De cette
façon, il est libre de consacrer toute ses pensées aux douze États
indécis, sur les votes desquels l’élection se déciderait. Il divise ceux-ci
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en groupes de cinq mille électeurs, nommant pour chaque groupe un
homme sur place, et un autre au siège national. Il calcule que sur les
cinq mille, quatre mille, en parts égales, ne pourraient probablement
pas être détournés de son propre parti ou de l’autre, et cela fait tomber
son analyse à mille électeurs indécis - dans chaque groupe de cinq
mille dans les douze États - sur lesquels se concentrer. L’homme local
est chargé d’obtenir toute les informations possibles sur leur « race,
religion, profession et anciens liens de parti », et de les expédier à
l’homme national responsable du groupe en question, qui est alors
chargé d’atteindre chaque individu au moyen de « la littérature, de la
persuasion ou peut-être par quelque argument plus subtil. » Le devoir
des deux agents pour chaque groupe, un sur le terrain et l’autre au
siège, est à eux deux de « ramener une majorité, sur les mille votes qui
étaient à leur charge. »
Entre-temps, les directeurs de l’autre parti envoyaient « des
tonnes d’imprimés à leur siège de l’État, qui, à son tour, les distribuait
aux organismes de province, où ils étaient déposés dans un coin et
donnés aux visiteurs quand il le demandaient. Le comité de Selwyn en
utilisait le quart, mais chaque imprimé arrivait dans une enveloppe
scellée, avec une lettre cordiale, adressée à un électeur qui n’avait pas
encore décidé pour qui voter. L’opposition envoyait à grands frais des
orateurs d’un bout à l’autre du pays… Selwyn envoyait des hommes
au sein de ses groupes pour persuader personnellement chacun des
mille électeurs hésitants de soutenir la liste Rockland. »
Par cette méthode des plus habiles d’analyse, d’élimination et de
concentration, Rockland, dans le roman, (et M. Wilson, dans la réalité)
fut élu en 1912. L’appel concentré aux « mille électeurs hésitants » de
chaque groupe fut particulièrement axé sur l’émotion de la « race, du
credo et de la couleur », et les objets d’attention furent évidemment
choisis en ayant cela à l’esprit. « Ainsi, Selwyn gagna-t-il et Rockland
devint la pierre angulaire de la voûte qu’il avait entrepris de
construire. »
Le reste du roman est sans importance, mais contient quelques
autres points significatifs. Son sous-titre est « Une Histoire de Demain,
1920-1935 ». Le héros, Philip Dru, est un jeune sorti de West Point et
influencé par Karl Marx, qui est élu leader d’un mouvement de masse
par acclamation lors d’un rassemblement d’indignation après que la
conspiration de Selwyn et Thor fut devenue connue. La façon dont cela
est révélé est également intéressante ; Thor fait poser un microphone
dans sa pièce (chose peu connue en 1912, mais aujourd’hui presque
aussi familière en politique que le Stateman’s Yearbook17 et, oubliant
298
de le débrancher, sa « jubilante » conversation avec Selwyn après
l’élection de Rockland est découverte par sa secrétaire, qui la donne à
la presse ; un épisode des plus invraisemblables est que la presse la
publie ! Alors, Dru rassemble une armée (armée, apparemment par
magie, de fusils et d’artillerie), défait les forces du gouvernement en
une seule bataille, marche sur Washington et se proclame
« Administrateur de la République ». Sa première action majeure (et
celle du président Wilson) est d’introduire « un impôt progressif sur le
revenu, n’exemptant aucun revenu quelqu’il soit » (le Manifeste
communiste de Karl Marx exigeait « un lourd impôt sur le revenu,
progressif ou graduel » ; les Protocoles, « un impôt progressif sur la
propriété »).
Dru attaque ensuite le Mexique et les républiques de l’Amérique
Centrale, les vainquant aussi lors d’une seule bataille et les unissant
ensuite sous le drapeau américain, qui dans le chapitre suivant
devient également « l’emblème incontesté de l’autorité » sur le Canada
et les Anglais, les Français et d’autres possessions des Antilles. Selwyn
et Philip Dru sont manifestement tous deux M. House. Selwyn est
l’organisateur de parti superbement efficace et le secret détenteur du
pouvoir ; Dru est « le rêveur utopique » (les Protocoles) embrouillé qui
ne sait pas quoi faire du pouvoir quand il l’obtient. Inévitablement, à la
fin, M. House ne savait pas quoi faire avec deux personnages qui
étaient en vérité un seul homme, et fut contraint de les fusionner, pour
ainsi dire, en faisant de Selwyn, à l’origine le scélérat de l’histoire, le
confident et compagnon intime de Dru. Après cela, il semble également
clair qu’il ne savait pas quoi faire avec Dru, hormis le faire poursuivre
par des ours. Il le mit donc sur un bateau se dirigeant vers une
destination inconnue, avec Gloria (une fille en mal d’amour qui
pendant cinquante chapitres doit écouter les plans incohérents de Dru
pour refaire le monde), et conclut : « Heureuse Gloria ! Heureux
Philip !… Où partaient-ils ? Reviendraient-ils ? C’étaient les questions
que tous se posèrent, mais auxquelles personne ne put donner de
réponse ».
En fait, rares sont ceux qui ont pu réussir à terminer ce roman, et
personne ne se serait soucié de savoir où allaient Philip et Gloria, à
une exception près. Il y avait au monde un être solitaire pour qui
l’histoire dut comporter une signification aussi terrible et vraie que le
Portrait de Dorian Gray pour Dorian : M. Woodrow Wilson. À cet égard, Philip Dru: Administrator est un ouvrage unique. Deux questions
hantent le chercheur. M. Wilson le lit-il ? Qui souffla à M. House (ou à
son souffleur) de publier cette illustration exacte de ce qui se passait,
au moment même où « la créature » était désignée et élue? Considéré
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sous cette lumière, le livre devient un ouvrage de moquerie sadique, et
le lecteur prend conscience que le groupe d’hommes qui entourait M.
House devait être aussi malveillant que ceux qui sont décrits dans le
chapitre « Les conspirateurs jubilants ».
Peut-on envisager que M. Wilson ne l’ait pas lu ? Parmi ses
ennemis et ses amis, au cours d’une campagne électorale, quelqu’un a
dû le mettre dans ses mains. Le chercheur en Histoire doit
nécessairement demander si la lecture de ce livre, à cette période-là ou
par la suite, put causer l’état mental et physique dans lequel il tomba
peu après. On peut en donner quelques descriptions contemporaines
en guise d’illustration (bien qu’elles anticipent un peu la chronologie
du récit). M. House écrivit plus tard à propos de l’homme qu’il avait
« choisi » et avait fait élire (« le seul qui en tout point se montrait à la
hauteur du poste ») : « Je pensai à ce moment-là » (1914) « et à
plusieurs occasions par la suite, que le président voulait mourir ;
certainement, son attitude et son état mental indiquaient qu’il n’avait
aucun appétit de vivre. » Alors que M. Wilson était président depuis
peu, M. Horace Plunkett, l’ambassadeur britannique, écrivit à M.
House : « J’ai présenté mes respects au président, et j’ai été choqué de
lui voir l’air si épuisé ; le changement depuis janvier dernier est
terriblement marqué. » Six ans plus tard, William Wiseman, un
émissaire gouvernemental britannique, dit à M., House : « J’ai été
choqué par son aspect… Son visage était tiré et d’une couleur grise, et
se convulsait fréquemment dans un effort pitoyable pour contrôler ses
nerfs qui avaient lâché. » (1919) 18
Apparemment, la clé du chagrin est de recevoir une haute fonction
en tant qu’instrument d’autres personnes qui restent dans l’ombre. M.
Wilson prend inévitablement un air spectral quand on l’examine à la
lumière de ce récit en cours de déroulement. M. House, le rabbin Wise
et d’autres autour de lui semblèrent le contempler de la même façon
que les collectionneurs contempleraient un spécimen épinglé. Vu l’état
des choses, il dût être guidé par la conjecture, plutôt que par la
révélation, lorsqu’à l’âge de vingt ans il décida qu’il serait un jour
président. On le savait, et le rabbin Wise lui demanda un jour :
300
« Quand avez-vous pensé ou rêvé pour la première fois à la
présidence ? » Comme le rabbin en savait tellement plus que le
président sur la manière dont le rêve avait été réalisé, il était peutpetre
ironique, et fut manifestement surpris dans sa déférence
habituelle quand M. Wilson répondit : « Il n’y eut jamais un moment
après mon diplôme obtenu à l’université Davidson en Caroline du Sud
où je ne m’attendais pas à devenir président », si bien que le rabbin
demanda sardoniquement : « Même quand vous étiez enseignant dans
une université de filles ! » M. Wilson, apparemment toujours
inconscient, répéta : « Il n’y eut jamais un moment où je ne m’attendai
pas et ne me préparai pas à devenir président. »
Entre « le choix » secret de M. Wilson par M. House en 1910 et sa
nomination publique pour la présidentielle en 1912, il fut poussé à
rendre un hommage public au sionisme ; à ce moment, les Américains
commencèrent à simpliquer, de même que le peuple britannique s’était
effectivement engagé à partir de l’offre de l’Ouganda en 1903. M.
Wilson, dans sa préparation à la campagne, fit un discours sur « Les
droits des juifs », dans lequel il dit : « Je ne suis pas ici pour exprimer
notre sympathie envers nos concitoyens juifs, mais pour rendre évident
notre sentiment d’identité avec eux. Ceci n’est pas leur cause ; c’est celle
de l’Amérique. »
Cela ne pouvait signifier qu’une chose ; c’était une déclaration de
politique étrangère, si M. Wilson était élu. Il n’y avait aucune nécessité
de « rendre évident le sentiment d’identité » entre les Américains et les
Américains, et les juifs en Amérique étaient en tous points libres et
égaux ; seul un refus de s’identifier à l’Amérique pouvait altérer cela, et
M. Wilson proclama dans les faits ce refus. Il déclarait spécifiquement
que « l’identité » juive était différente et séparée, et que l’Amérique,
sous lui, soutiendrait cette auto-ségrégation comme une cause.
Pour les initiés, c’était un engagement envers le sionisme. C’était
aussi une allusion et une menace indirectes à la Russie, car
l’implication des mots de M. Wilson était qu’il reconnaissait les juifs en
Russie (qui étaient alors les seuls sionistes organisés) en tant que
représentants de tous les juifs. Ainsi, il reprit le rôle de Balfour dans la
production américaine de ce drame.
À cette époque, toute la propagande sioniste était dirigée contre la
Russie. Environ trente ans avaient passé depuis l’assassinat du tsar
Alexandre II, qui s’était attiré l’hostilité des révolutionnaires par sa
tentative de présenter une constitution parlementaire (le Dr Kastein fit
remarquer que la participation juive à l’assassinat était « naturelle. »)
Son successeur, Alexandre III, fut forcé de se consacrer au combat
contre la révolution. À l’époque de M. Wilson, le tsar Nicolas II
reprenait la tentative d’Alexandre le Libérateur de pacifier et d’unifier
son pays en accordant le droit de vote au peuple, et rencontrait une
301
fois encore une opposition acharnée de la part des sionistes
talmudiques.
Puis, au moment même où M. Wilson fit son attaque implicite
envers « l’intolérance » russe, l’assassinat fut à nouveau utilisé en
Russie afin de détruire l’oeuvre de Nicolas II. Pendant la révolution de
1906, il avait publié un décret impérial faisant de la Russie une
monarchie constitutionnelle, et en 1907, il introduisit le suffrage
universel. Les révolutionnaires craignaient cette mesure de libération
plus qu’ils ne craignaient n’importe quel Cosaque, et utilisèrent
l’Assemblée populaire, quand elle se réunit pour la première fois, pour
déclencher un tumulte déchaîné, si bien qu’on dut la dissoudre. Le
tsar choisit alors pour Premier ministre un diplomate éclairé, le comte
Stolypine, qui par décret ordonna une réforme agraire suivie par de
nouvelles élections. Le résultat fut qu’au second parlement, il reçut une
grande ovation, et les révolutionnaires furent mis en déroute (environ
3 000 000 de paysans sans terre devinrent propriétaires de leur terre).
L’avenir de la Russie à ce moment-là semblait plus brillant que
jamais auparavant. Stolypine était un héros national et écrivait :
« Notre but principal est de fortifier la population agricole. Toute la
force du pays repose dessus… Donnez à ce pays dix ans de tranquillité
intérieure, et vous ne reconnaîtrez pas la Russie ».
Ces dix années tranquilles auraient changé le cours de l’histoire
pour le mieux ; au lieu de cela, la conspiration intervint et provoqua
les dix jours qui bouleversèrent le monde. En 1911, le comte Stolypine
se rendit à Kiev, où le tsar devait inaugurer un monument au
libérateur assassiné, Alexandre II, et il fut abattu lors d’une
représentation de gala au théâtre, par un révolutionnaire juif, Bagroff
(en 1917 un commissaire juif, découvrant qu’une jeune fille, parmi
certains fugitifs, était la fille du comte Stolypine, se hâta de l’abattre).
C’est arrivé en septembre 1911; en décembre 1911, M. Wilson, le
candidat, faisait son discours exprimant « un sentiment d’identité »
avec « la cause » juive. En novembre 1911, M. Wilson avait pour la
première fois rencontré l’homme, M. House, qui l’avait « choisi » en
1910 (et qui avait alors déjà « aligné tous mes amis politiques et
partisans » sur le soutien de M. Wilson). M. House annonça à son
beau-frère : « Jamais auparavant n’ai-je trouvé à la fois l’homme et
l’opportunité. »
Avant l’élection, M. House dressa une liste de membre du Conseil
des ministres (voir Philip Dru), en concertation avec un certain M.
Bernard Baruch, qui entre maintenant dans ce récit. Il se pourrait
bien qu’il soit le plus important de tous les personnage qui y
apparaîtront au cours des cinquante années suivantes, car il devait se
faire connaître comme « conseiller » de plusieurs présidents, et dans
302
les années 1950, il conseillait toujours le président Eisenhower et M.
Winston Churchill. En 1912, il n’était publiquement connu qu’en tant
que financier qui avait hautement réussi. Son biographe déclare qu’il
contribua pour $ 50 000 à la campagne de M. Wilson.
Puis, pendant la campagne électorale, on fit sentir le mors à M.
Wilson. Après des imprudences initiales, il promit à M. House (tel que
cité plus tôt, et comparé à Philip Dru) « de ne pas agir en indépendant à
l’avenir. » Immédiatement après l’élection, il reçut le rabbin Stephen
Wise « pour une longue session » au cours de laquelle ils discutèrent « des affaires russes, en se référant spécialement au traitement des
juifs » (M. Wise). Au même moment, M. House déjeunait avec un
certain M. Louis D. Brandeis - juriste éminent, et juif - et rapporta que « son esprit et le mien sont en accord concernant la plupart des questions
qui se posent maintenant à nous. »
Ainsi, trois des quatre hommes dans l’entourage de M. Wilson
étaient des juifs et tous les trois, à une étape ou une autre, jouèrent
des rôles majeurs en promouvant la re-ségrégation des juifs par le
biais du sionisme et de son ambition palestinienne. À ce moment-là,
M. Brandeis et le rabbin Wise étaient les sionistes principaux en
Amérique et M. Brandeis, alors qu’il fait son entrée dans l’histoire,
mérite un paragraphe.
Il était distingué en apparence et en intellect, mais ni lui ni un
autre avocat n’auraient pu définir ce qui, en lui, constituait « un juif ».
Il ne pratiquait pas la religion judaïste, que ce soit dans sa version
orthodoxe ou réformée, et écrivit une fois : « Durant la plus grande
partie de ma vie, mon contact avec les juifs et le judaïsme fut léger, et
je pensai peu à leurs problèmes. » Sa conversion était du genre
irrationnel et romantique (rappellant M. Balfour) : un jour, en 1897, il
lut au petit déjeuner un compte-rendu du discours du docteur Herzl
au Premier Congrès sioniste, et dit à sa femme : « Voilà une cause à laquelle je pourrais donner ma vie. »
Ainsi, le juif américain totalement assimilé fut-il transformé en un
clin d’oeil. Il afficha l’ardeur du converti dans ses attaques ultérieures
contre « l’assimilation » : « L’assimilation ne peut être évitée à moins
que, dans la Patrie, un centre soit rétabli, à partir duquel l’esprit juif
puisse rayonner. » Les sionistes de la Russie ne firent jamais confiance
à ce produit de l’assimilation qui voulait maintenant se désassimiler.
Ils détestaient ses discours fréquents sur « l’américanisme. » Il disait :
« Mon approche du sionisme se fit par l’américanisme », et pour les
talmudistes cela revenait à dire que le sionisme pouvait être approché
par le « russianisme », qu’ils étaient résolus à détruire. En fait, il était
illogique de préconiser la forme la plus féroce de ségrégation raciale
tout en prétendant admirer l’assimilationisme américain, et M.
Brandeis, avec toute ses compétences d’avocat, semble ne jamais avoir
303
vraiment compris la nature du sionisme. Il devint le Herzl des sionistes
américains (le rabbin Stephen Wise était leur Weizmann), et fut
brutalement abandonné après avoir rempli son rôle. Cependant, au
moment décisif, en 1917, il joua un rôle décisif.
Tel était le regroupement autour d’un président captif tandis que
la République américaine s’avançait vers l’engagement dans la
Première Guerre mondiale, et telle était la cause qui allait être
poursuivie à travers lui, et à travers l’engagement de son pays. Après
son élection, M. House prit en main sa correspondance, décida qui il
devait voir ou ne pas recevoir, dit aux membres du cabinet ce qu’ils
devaient dire ou ne pas dire, etc… Entre temps, il avait aussi trouvé le
temps d’écrire et de publier ce roman étonnant. Il voulait le pouvoir et
l’obtint, mais ce qu’il voulait d’autre, suite à cela, il ne le décida
jamais. Ainsi, son ambition était-elle sans but, et rétrospectivement, il
ressemble maintenant à Savrola, le héros du roman d’un autre
politicien, dont l’auteur, M. Winston Churchill, dit : « L’ambition était
la force motrice, et Savrola était impuissant à y résister ». À la fin de sa
vie, M. House, seul et oublié, détestait Philip Dru.
Mais entre 1911 et 1919, la vie fut délicieuse pour M. House. Il
adorait le sentiment de pouvoir pour le pouvoir, et de plus était trop
gentil pour vouloir nuire à Rockland à la Maison Blanche : «
C’était invariablement mon intention, avec le président comme
avec tous les autres hommes que j’ai cherché à influencer, qu’il pense
que les idées qu’il tirait de moi étaient les siennes. Dans la nature des
choses, j’ai plus réfléchi à de nombreuses choses que le président, et
j’avais eu l’occasion d’en discuter plus en profondeur que lui. Mais
aucun homme n’aime honnêtement voir un autre homme diriger ses
conclusions. Nous sommes tous un peu vaniteux sur ce point. La
plupart des gens sont bien trop guidés par la vanité personnelle, dans
leurs actes. Il se trouve que ce n’est pas mon cas. Ca m’est égal qui
obtient le mérite pour une idée que j’ai transmise. Le principal est que
l’idée fonctionne. Habituellement, à dire vrai, l’idée n’était pas de
moi… » (M. Howden, déjà cité).
Ainsi, quelqu’un « dirigea » M. House, qui dirigea M. Wilson, vers
la conclusion qu’un groupe d’hommes dans les régions talmudiques de
Russie devaient être mis en possession de la Palestine, avec la
conséquence évidente qu’une source permanente de guerre mondiale
serait établie là-bas, et que les juifs du monde seraient à nouveau
isolés de l’humanité. Dans ce plan, la destruction de la Russie et la
diffusion de la révolution mondiale étaient aussi impliquées de
manière prévisible.
À cette période (1913), un événement se produisit, qui sembla peu
important alors, mais qu’il faudrait rapporter ici, à cause de sa
304
conséquence importante par la suite. En Amérique, il y avait une
organisation appelée B’nai B’rith (« les Enfants de l’Alliance », en
hébreu). Fondée en 1843 comme loge fraternelle exclusivement
réservée aux juifs, on la qualifia d’ « institution purement américaine »,
mais elle créa des branches dans de nombreux pays, et prétend
aujourd’hui « représenter tous les juifs du monde entier », au point
qu’elle semble faire partie de l’arrangement que le Dr Kastein décrit
comme « l’Internationale juive. » En 1913 B’nai B’rith créa une
minuscule ramification, l’ « Anti-Defamation League » [Ligue Anti-
Diffamation – NdT]. Elle devait prendre une taille et un
pouvoir immense ; avec elle, l’État-dans-les-États se dota d’une sorte
de police secrète, et elle réapparaîtra dans cette histoire.
Avec l’accession de M. Wilson et du groupe derrière son siège de
président, la décor fut installé pour la guerre qui était sur le point de
commencer. La fonction de l’Amérique, dans sa promotion du grand
« dessein » supranational par le biais de cette guerre, devait être celle
d’auxiliaire. Dans cette première étape, l’Angleterre fut choisie pour le
premier rôle, et l’objectif principal - le contrôle du gouvernement
britannique - n’avait pas été entièrement acquis quand la guerre
commença.
Ainsi, l’histoire retraverse maintenant l’Atlantique jusqu’en
Angleterre, où M. Balfour était en passe de reprendre à nouveau ses
fonctions. Les personnages marquants d’Angleterre étaient toujours
résistants au but et plan secrets, et avaient l’intention de faire la
guerre, et de la gagner aussi rapidement que possible, à l’endroit où
elle avait commencé - l’Europe. Ils fallait les ramener dans le rang si
on voulait que le processus prédit par Max Nordau en 1903 soit
accompli. Donc, les hommes récalcitrants devaient être disciplinés, ou
bien éliminés.
De 1914 à 1916, ainsi, l’histoire devient celle de la lutte pour
destituer ces hommes en Angleterre, et les supplanter par d’autres qui,
comme M. Wilson, s’aligneraient.
17. Ouvrage qui paraît depuis le milieu du 19e siècle environ, utilisé dans les milieux politiques et diplomatiques anglo-saxons de l'époque. On y trouve pour chaque pays, les événements historiques marquants, le type de constitution et de gouvernement, les institutions sociales y compris l'organisation judiciaire et les religions - NdT (retournez)
18. De fortes ressemblances se retrouvent dans les descriptions contemporaines de M. Roosevelt, dont M. House croyait aussi qu'il l'avait choisi comme « homme de paille ». M. Robert E. Sherwood dit avec insistance que M. Roosevelt était toujours hanté « par le fantôme de Wilson ». Alors que M. Roosevelt était président depuis deux ans, le directeur de son parti, M. James Farley, écrivit : « le Président semblait aller mal... visage tiré et réactions lentes » (1935) et deux ans plus tard, il fut « choqué par l'aspect du président » (1937). En 1943, Madame Tchang Kai-chek fut « choquée par l'apparence du président » ; en 1944, dit M. Merriman Smith, « Il semblait plus vieux que je l'ai jamais vu et il fit un discours hors de propos », et M. John T. Flynn dit que les photos du président « choquèrent la nation ». En 1945, Mlle Françoise Perkins, un membre de son cabinet, sortit de son bureau en disant : "Je ne peux pas supporter ça, le président a une apparence affreuse. » (retournez)
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